Le Postier Affranchi numéro 48

COMMUNICATION DE LA POSTE EN
PÉRIODE DE RÉORGANISATION :
UN QUESTIONNAIRE EN TROMPE-L’ŒIL !!!

Sur le site d’Ermont Il nous a été récemment remis « un questionnaire préparatoire réorganisation » en vue du nouveau chamboulement prévu pour mars 2016. Il est précédé d’un petit mot du Directeur, petit mot qui en dit long, qui explique qu’il s’agit de « préparer au mieux ce dossier ». En effet pour lui une réorganisation c’est un « dossier » qu’il doit « mener au mieux », c’est-à-dire sans faire de vague, en douceur, sans résistance, afin d’atteindre ses objectifs en matière de suppressions d’emplois et de mise en place « d’organisations innovantes ». Si le « dossier » se passe « au mieux » il sera félicité par sa hiérarchie et tout ira pour lui « pour le mieux ». Pour nous une réorganisation ce n’est pas un « dossier » c’est une source d’inquiétude, de stress, d’interrogations sur nos rythmes de travail, sur les conséquences que cela peut avoir dans nos vies privées, sur la garde des enfants avec des horaires qui changent tout le temps, l’apprentissage souvent d’une nouvelle tournée, et parfois un reclassement ici ou là. Nous sommes donc en présence de deux réalités incompatibles : celle du Directeur qui gère un dossier, et en bas notre réalité,des personnes impactées dans nos conditions de vie, de travail. Le but de ce questionnaire est de faire croire le contraire, que la réorganisation c’est une préoccupation commune, partagée par les uns et les autres. De plus nous sommes informés que ce questionnaire sera suivi d’un entretien individuel avec un encadrant. Et sur la base du questionnaire il s’agira pour l’encadrant de savoir si nous sommes mécontents, acquis au projet, hostiles, indifférents, décidés à lutter ou résignés. Prendre la température, voir si nous sommes à 40°, ou à 37°5, température idéale, »au mieux ». Mais voyons le détail de ce questionnaire…

Tout à coup la Direction s’inquiète
de nos conditions de travail !!!

En effet, on ne rêve pas, on nous demande si nous avons « des stylos, des étiquettes, un tabouret », si le « casier est adapté » si nous avons des « problématiques particulières sur la mécanisation du produit », si nous « avons des remarques concernant le parcours de notre tournée », si un autre « moyen de locomotion ne serait pas plus adapté à la tournée ». Diable messire quelle sollicitude soudaine pour le petit peuple alors que depuis des mois certains ont signalé qu’ils ne pouvaient accéder à des BAL à cause de travaux, que les cases étaient inadaptées, quel empressement à nous demander notre avis !! Cela s’appelle une opération séduction, dormez bien braves agents, le marchand de sable fait son boulot. Et si quelqu’un ronchonne on lui donnera un stylo, des étiquettes, un tabouret et il pourra trier même si un an plus tard on supprime sa tournée et qu’il se retrouve sur son tabouret, avec son stylo et ses étiquettes mais sans casier.

Tout à coup la Direction nous demande
notre avis !!!

On nous demande comment nous voulons être informés ? Si nous voulons participer à un groupe de travail (alors qu’au même moment sur le site de St-Gratien le découpage est fait à huis clos) ? Si lors du dernier chambouletout (synonyme de réorg) nous avions été informés ? (alors que c’est le même Directeur qui pilotait la communication) ? On s’inquiète à propos du fonctionnement du service : notre manager (tiens on se croirait à MacDo) est-il disponible ? (Quand il n’est pas en tournée, en réunion, en séminaire, en grande messe ???). On nous demande s’il existe des « moments d’échange avec votre manager » (Comme lors des demandes d’explications qui ont entraîné le licenciement de Simon ?), comme si les rapports se faisaient entre potes et que la hiérarchie avait disparu… Cerise sur le gâteau : « L’organisation est-elle connue et expliquée en cas de sécabilité ? », ce qui implique qu’elle peut ne pas être connue, aveu énorme qui donne raison à Simon et aux Prud’hommes, dont le seul crime est d’avoir voulu faire respecter une règle en cas de sécabilité, mais apparemment elle n’est peut-être pas connue !! Et on nous demande les points forts de l’organisation actuelle, les points à améliorer… Le temps du questionnaire on pourrait croire que nous pouvons décider quelque chose

Tout à coup La Direction se préoccupe
de la vie au travail !!!

Avons-nous une bonne salle de repos ? Le rapport vie au travail/vie personnelle est-il équilibré ? Bizarrement personne ne se soucie de cette question en plein hiver lors de la mise en place d’une sécabilité inopinée… Puis, tout à coup, the question « l’organisation future » !!! Et il n’y a que des questions pièges :

  • « Êtes-vous intéressé-e par une position avec plus de travaux intérieurs et moins de distribution ? » Ceux et celles qui fatiguent sur le vélo, en ont marre des intempéries, répondront Yes ! Sir ! Et la direction dira : bon j’en ai 4 ou 5 qui sont prêts à préparer la tournée des autres. Une première pierre de la méridienne est posée.
  • « Êtes-vous intéressé–e par des horaires en mixtes, 8h45-16h15 (pause méridienne). » Là nous y sommes. Des postiers de l’Essonne ont fait 50 jours de grève contre cette organisation.
  • « Seriez-vous intéressé–e par la réduction de la fatigue liée au haut le pied en pratiquant le covoiturage en 4 roues par exemple ? » Et si je finis avant le collègue je l’attends pour rentrer ? » « Je l’aide pour finir plus vite ? ».
  • « Souhaitez-vous que l’on vous livre le courrier prêt à distribuer sur votre zone de distribution pour vous éviter un aller-retour à la PDC ? » Là notre seigneur est trop bon, il s’inquiète soudain de notre fatigue !! Mais cela signifie que je passerai toute ma vacation dehors, hiver comme été, plus de travaux intérieurs, mais chef,vous ne croyez pas que cela va aggraver ma fatigue ? Et quand je pourrai discuter avec les collègues ? Et profiter de l’espace de travail dont vous m’avez parlé au début, vous l’aviez si bien aménagé la salle de repos, À quoi me serviront toutes les étiquettes que vous m’avez donné à la question une ? Et mon tabouret je l’emporte sur mon dos pour ma pause solitaire près de la voie ferrée ? Et surtout mon pauvre manager que va–t-il devenir sans ces précieux moments d’échanges dont vous me parliez tantôt ? Lui qui soudain est devenu disponible pour s’occuper de moi, je ne le verrai plus ???
  • Et le gag final « Souhaitez-vous vous exprimer au sujet de la réorganisation ? » Tout à coup on pige où ils veulent en venir !! Les ¾ du questionnaire sont des amuse-gueules. Seule est importante pour eux la « future organisation ». Leurs scénarios sont dans les cartons, ils essaient de nous amener à cautionner leur choix en nous consultant individuellement.

Notre réponse sera
COLLECTIVE,
Avec ceux et celles
qui refusent d’être
des pions manipulés.

Mais pourquoi nos cadres
changent-ils de nom ?
Ou la petite histoire du chef
d’équipe qui devient manager…

Telle est la légitime question que se posent
parfois les plus anciens : on a eu chef
d’équipe, encadrant de proximité et maintenant
manager. Que se cache-t-il derrière ces mots ?
Avant de donner la clef de l’énigme un petit rappel.
Chef d’équipe : C’était il y a longtemps, longtemps,
son rôle était de veiller à une distribution
en J+1, objectif ambitieux alors mais atteint à
85%, la satisfaction de l’usager était au coeur de
la pratique professionnelle, et le chef d’équipe
avait alors un volant de
remplacement pour pallier
aux absences inopinées, et
la Poste n’avait pas été privatisée.
Tout n’était pas
rose mais ce n’était pas
pire.
Encadrant de proximité :Ce terme est apparu au milieu
des années 2000, on a
changé le statut de la
Poste, l’on parle désormais
de clients et de recherche
du profit, de rentabiliser. Le chef d’équipe est
promu encadrant de proximité, comme si hier il
habitait sur Mars… Mais encadrant cela sonne
mieux, cela fait cadre, reconnaissance, valorisation,
même si dans les faits cela reste toujours
une fonction qui relève de la maîtrise. Et il est
de proximité : marquage à la culotte ? Ecoute
des agents ? On l’ignore. Mais souvent il sort de
plus en plus pour pallier aux absences, et est de
moins en moins de proximité puisqu’on le
cherche parfois, perdu entre une tournée à découvert,
une réunion sur un autre site…
Manager : La Poste a été privatisée, l’objectif
de distribution n’est plus le J+1 mais le J+2 avec
la lettre « verte ». Au moment où dans la société
la communication va de plus en plus vite la
Poste choisit de mettre plus de temps pour distribuer
le courrier !! Pas grave, l’encadrant est
devenu un manager, même terme que chez
MacDo, et ce n’est pas le fruit du hasard.Pour
comprendre le pourquoi de cette nouvelle métamorphose un peu d’histoire.

Management, kézaco ?

C’est un terme qui vient du verbe anglais
« To manage », synonyme de « To Handle » qui
signifie « Tenir en main, manipuler ». « Manipuler,
Kézaco ? » : C’est un verbe issu de « manipulation
 » dont le dico nous dit qu’en politique
ce mot désigne « une manoeuvre destinée à
tromper ». Par « manager » il faut donc comprendre
« faire croire », « tromper », « vendre
 ». Par extension faire faire à des personnes, par
crainte ou conviction, ce que libres elles ne feraient
jamais.
Le management a donc pour objectif d’obtenir du personnel ce que l’on veut, par ruse
ou bien par obligation. Depuis
longtemps, et surtout
depuis la grève générale de
Mai 68, les dirigeants veulent
comprendre les réactions
humaines pour mieux
les contrôler. C’est ainsi que
l’organisation verticale du
travail, avec une hiérarchie
descendante, muselant le
salarié, a été remplacée par
une organisation qui se veut
« participative ».
Après la nouvelle cuisine, la nouvelle philosophie,
le beaujolais nouveau, le « nouveau
chef est arrivé » : il écoute, tape l’incruste devant
la machine à boissons, discute, te demande
ton avis, te jauge mine de rien, te tire les
vers du nez,… Ils ne parlent plus d’exécutants
mais de collaborateurs, on est tous devenus
des collaborateurs. Mais s’il y a changement sur
la forme ce nouveau look est au service de la même politique patronale : à la Poste faire plus
de fric, supprimer des positions de travail, liquider
le service public.
Mais si cela ne fonctionne pas, alors on
ressort la panoplie du père fouettard : sanctions,
conseils de discipline.
Alors il s’agit de résister à ces nouvelles
formes de domination. Et ne pas oublier que si
les décideurs peuvent décider
ce qu’ils veulent, la bonne application
des décisions dépend
des travailleurs.

SYNDICAT CNT-POSTE DU VAL D’OISE
Fédération des activités postales,
du courrier et des télécommunications.

Auteur :
Publié le : 21 juin 2015
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